Affaire Tarnac : « Ce sera le procès de l’antiterrorisme français »

samedi 10 novembre 2012
par  onvaulxmieuxqueca
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Source : La Presse.CA
Publié le 10 novembre 2012

Affaire Tarnac : « Ce sera le procès de l’antiterrorisme français »

Marc Thibodeau

(Paris) L’arrestation spectaculaire en novembre 2008 d’un groupe de jeunes militants vivant dans le petit village de Tarnac, en France, avait été présentée par le gouvernement comme un triomphe de la lutte antiterroriste contre l’« ultragauche ».

Quatre ans plus tard, les avocats des accusés multiplient les révélations pour étayer le caractère « grotesque » d’un processus policier et judiciaire controversé auquel a notamment contribué la Gendarmerie royale du Canada.

L’affaire de Tarnac, dans laquelle une dizaine de militants anticapitalistes sont accusés d’avoir participé à une « entreprise terroriste » ciblant l’État français, pourrait tourner court en raison de nouvelles révélations concernant l’enquête.

Les avocats des accusés, qui se voient reprocher plus particulièrement d’avoir voulu entraver la circulation sur des lignes de train à haute vitesse en 2008, se disent convaincus que l’obtention d’un non-lieu embarrassant pour les autorités n’est qu’une question de temps.
« S’il y a un procès, ce sera le procès de l’antiterrorisme français », affirme en entrevue Jérémie Assous, l’un des avocats du groupe.

Une requête a notamment été présentée cette semaine pour établir le rôle d’un ex-agent infiltré anglais, Mark Kennedy, dans la constitution du dossier préparé par les services policiers français.

Les allégations de l’agent controversé, aujourd’hui considéré comme une source peu fiable, auraient alimenté des analyses « fantaisistes » des forces de l’ordre.

Un tribunal a parallèlement autorisé l’audition de policiers qui décrivent dans un procès-verbal contesté la filature de deux membres du groupe d’accusés, Julien Coupat et Yildune Lévy, et leurs actions à proximité d’une ligne de chemin de fer où une caténaire a été ciblée dans la nuit du 7 au 8 novembre.

Selon M. Assous, l’étude des relevés de positionnement des téléphones des policiers, aussi autorisée par le tribunal, devrait permettre de démontrer qu’ils ont menti sur l’endroit où ils se trouvaient.

Une information concernant un retrait bancaire fait par Yildune Lévy à Paris pendant qu’elle se trouvait prétendument sous filature en Seine-et-Marne est aussi venue contredire la version des autorités, relate-t-il.

L’avocat se dit convaincu que les forces de l’ordre ont transformé les faits concernant le groupe de Tarnac pour « créer un ennemi intérieur » qui justifiait leur travail et cadrait avec le programme politique du gouvernement de l’époque.

David Dufresne, auteur d’un long ouvrage sur l’affaire intitulé Tarnac, magasin général, ne veut pas se prononcer sur la véracité des actions imputées par la justice aux accusés, qui ont toujours affirmé leur innocence.

« On ne saura peut-être jamais ce qui s’est passé vraiment » dans la nuit du 7 au 8 novembre, souligne l’auteur, qui a rencontré de nombreux acteurs de l’histoire au cours d’une enquête qui s’est étalée sur trois ans.

Le journaliste, qui est établi aujourd’hui au Québec, pense que l’affaire est surtout intéressante par ce qu’elle révèle « en creux » de la manière dont est menée la lutte contre le terrorisme en France.

Le recours à une « instruction à charge », dans laquelle seuls les éléments étayant l’idée d’une dangereuse organisation étaient retenus, le recours à un agent infiltré et la pratique d’écoute électronique sans autorisation témoignent, selon lui, d’un modus operandi problématique qui semble fréquent.

La mise en cause du groupe de Tarnac, dit-il, est l’aboutissement d’une « construction » dans laquelle les services policiers « vont tout faire » pour étayer l’idée de la dangerosité des suspects, décrits au moment de leur arrestation comme les membres d’une mouvance « anarcho-autonome » déterminée à en découdre avec l’État.

***
Frelighsburg avant la prison

L’enquête du journaliste David Dufresne sur l’affaire de Tarnac montre que les autorités françaises ont commencé à accorder une attention particulière à Julien Coupat et aux autres membres du groupe après qu’il eut passé illégalement la frontière canado-américaine à pied avec Yildune Lévy, en janvier 2008.

Un homme québécois qui devait les récupérer dans le village de Frelighsburg après avoir traversé le poste douanier en voiture a été appréhendé et un sac contenant des affaires des deux hommes a été découvert.

Les deux Français, qui ont apparemment pu repartir du Canada sans être arrêtés, expliqueront par la suite que leur passage à pied visait à éviter d’avoir à se soumettre au fichage biométrique exigé des ressortissants français qui souhaitent séjourner aux États-Unis.

Un extrait de procès-verbal publié par M. Dufresne indique que le Québécois qui a facilité leur passage et un autre homme, qu’il ne nomme pas dans le livre, ont été interrogés quelques mois plus tard par la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

Les enquêteurs s’intéressaient notamment au rôle qu’aurait pu jouer Julien Coupat dans un attentat à la grenade perpétré en mars 2008 contre un centre de recrutement à Times Square. Leurs interrogations étaient notamment liées au fait que des photos de la célèbre place avaient été découvertes dans son sac en janvier et à sa participation, à la même époque, à une « réunion d’anarchistes » à New York qui n’aurait été en fait qu’une « simple discussion politique entre quelques amis et connaissances », au dire des avocats.

La GRC a refusé de répondre aux questions de La Presse sur son rôle, arguant qu’elle ne donnait aucune indication sur ses enquêtes si aucune accusation n’est portée.

Les recoupements n’ont permis de démontrer aucun lien entre Julien Coupat, les autres personnes présentes à New York et l’attentat à la grenade, selon un document américain. Les autorités françaises, alertées par les forces américaines, ont néanmoins sensiblement augmenté leur intérêt pour le groupe de Tarnac dans la foulée.

« Alors que les services de police français s’emballent à leur sujet, les Américains s’en détournent », souligne David Dufresne, qui décrit le passage de la frontière comme le point de départ de l’« engrenage » qui a mené à l’arrestation des militants en France neuf mois plus tard.


Rappel d’" On Vaulx Mieux que ça" :


Rebondissement dans l’affaire Tarnac par ITELE


Jeunes de Tarnac, Noël Mamère 16 décembre 2008 par ventreapattes136

L’affaire selon le gouvernement Sarkozyz


L’affaire selon le procureur JC Marin


Pour le procureur : « C’est un groupe à vocation... par ultrahumandignity


Le groupe de Tarnac au tribunal de Paris [news]... par peanutsie

ULTRARNAQUE TV


Tarnac / Médias / 11-15 novembre 2008 par rj_669ULTRARNAQUE TV


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