Lyon : des SDF verbalisés pour ne pas avoir respecté le confinement

vendredi 20 mars 2020
par  onvaulxmieuxqueca
popularité : 48%

Lyon : des SDF verbalisés pour ne pas avoir respecté le confinement

leprogrès.fr : Diane MALOSSE, jeudi 19 mars 2020

Comment rester confiné chez soi quand on n’a pas de chez soi ? Visiblement, les forces de l’ordre ne se posent pas toujours cette question. Le Samu social du Rhône indique au Progrès avoir fait parvenir un mail à la Préfecture concernant des cas de verbalisation de personnes sans domicile fixe. L’organisme en a recensé quelques-uns, « quatre ou cinq ».

« Il faut que le Préfet fasse stopper cela, il y a des limites à l’indécence », attaque Maud Bigot, responsable Samu social Alynea, qui précise avoir eu encore aujourd’hui un monsieur à la rue au téléphone à ce sujet.

« Mardi, j’ai deux personnes qui m’ont dit s’être pris une amende par des policiers, alors qu’elles avaient précisé ne pas avoir de toit », s’énerve franchement un travailleur social du 115, qui a écrit un long post Facebook pour partager son indignation.

Alexis Djivanides « Ce soir, j’ai la rage.
La vraie, la froide, celle qui te broie les tripes.

On nous dit de rester confinés, mais quand on n’a pas de « chez soi » ?
Que faire ?

AU 115, à Lyon, nous n’avons rien. Que dalle, nada, zéro.

A part le désarroi partagé et un peu d’écoute.

Les rares places que nous pouvions distribuer pour une nuit à l’abri sont maintenant fermées à cause du virus. Les foyers ont été mis en quarantaine.

Heureusement les SAMU Sociaux tournent encore, distribuant café et couverture pour essayer de supporter la nuit.

Les personnes qui vivent à la rue sont évidemment terriblement vulnérables niveau santé et n’ont absolument aucuns accès à l’hygiène.

Alors bien sûr, la trêve hivernale est prolongée de 2 mois, les foyers ayant ouvert seulement pour l’hiver ne remettrons les familles à la rue qu’en mai. Mais bien évidemment, tout le monde n’a pas eu de place cet hiver. Il y a encore énormément de familles, d’hommes, de femmes et d’enfants qui n’ont aucun toit et qui dorment dehors sans aucunes solutions…

Mais pour ces personnes, rien n’est fait… Pire, rien n’est pensé … Comme si elles n’avaient aucune valeur, comme si ce n’était plus des personnes.

Alors ce soir ils hurlent, insultent, pleurent, supplient. Mais à part ici, ou auprès des maraudes, qui les entends ?

Alors ce soir je suis là.

Cerise sur le gâteau de l’absurde et du cruel, plusieurs personnes SDF aujourd’hui m’ont appelé pour se plaindre d’avoir pris une amende de 38€ car elles ne respectent pas le confinement … A ces « agents » qui ont donné des amendes à des gens vivant dans la rue (et qui leur ont signalé, hein !), vous me donnez des haut-le-cœur… Vraiment… Il y un cercle en enfer qui vous est spécialement réservé où j’espère que vous brulerez éternellement

Ce soir, j’ai la rage.
Ce soir, je suis fatigué. »

La situation est particulièrement compliquée pour les plus démunis : les accueils de jour, lieu où ils ont possibilité de manger et se laver, sont quasiment tous fermés dans le Département, les dons de nourriture baissent, les passants solidaires dans la rue se font plus rares…

La Ville de Lyon a aussi fermé pendant un temps les fontaines : plusieurs associations contactées ont remarqué que les personnes manquaient tout simplement d’eau. Autre problème : les toilettes publiques, également fermées pour raison sanitaires. Rappelons que ces personnes n’ont même pas de quoi se laver les mains.

La préfecture réagit

Pascal Mailhos, préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes, préfet du Rhône, "rappelle que les faits relatés dans l’article de presse, s’ils étaient avérés, sont contraires aux instructions qu’il a données aux forces de l’ordre. Aussi, il a demandé au Directeur départemental de la sécurité publique du Rhône de diligenter une enquête interne pour faire toute la lumière sur cette affaire. Si d’éventuelles contraventions avaient été délivrées à des personnes sans domicile fixe, celles-ci seraient immédiatement annulées."

"L’appui aux personnes démunies et sans-abri constitue l’un des piliers de l’action de l’État, d’autant plus en cette période de crise sanitaire. Le préfet Pascal Mailhos porte personnellement une attention toute particulière à ce sujet très sensible."

"Le 115 est opérationnel et des orientations vers des places d’hébergement ont pu être réalisées hier à la suite d’alertes posées par des collectifs. Pour autant les places d’hébergement sont occupées dans la mesure où le renfort hivernal a été prolongé, ceci a permis de confiner les personnes présentes dans les structures d’hébergement. Les services de l’Etat (direction départementale de la cohésion sociale) recherchent actuellement des places qui pourraient permettre de proposer de nouvelles orientations aux personnes sans abri et remercient les collectivités territoriales et hôtels qui ont d’ores et déjà proposé des capacités d’hébergement."
Le président de la Métropole de Lyon, David Kimelfeld, a également réagi, assurant que la Métropole se tient à la disposition de l’Etat pour assurer l[a] protection" des personnes sans abri.

David Kimelfeld @DavidKimelfeld
Si cela se vérifie, ces actions sont bien évidemment contraires aux instructions. Le @prefetrhone fait le nécessaire pour que les personnes sans domicile soient rapidement mises à l’abris. Le @grandlyon se tient à la disposition de l’État pour assurer leur protection.

Ces faits, largement relayés sur les réseaux sociaux depuis la parution de cet article, ont suscité l’indignation de nombreux internautes. D’autant plus que le site d’information parodique Le Gorafi, avait publié le matin même un article - parodique - évoquant un sans-abri verbalisé pour ne pas avoir respecté le confinement.
Il semble que cette fois la réalité ait surpassé la fiction.


Commentaires