Bosnie-Herzégovine : « Qui sème la faim, recueille la colère ». Rendre les usines aux travailleurs et les placer sous le contrôle des autorités publiques afin de protéger l’intérêt public, et redémarrer la production de ces usines dès que cela est possible.

samedi 1er mars 2014
par  onvaulxmieuxqueca
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Source : Pour l’Autogestion

Bosnie-Herzégovine : « Qui sème la faim, recueille la colère »

Par Aleksandar Matković, publié le 19 février 2014

Les manifestations de Bosnie-Herzégovine nous adressent un message
Malgré les attaques des médias, les protestations sont radicales et marquent un changement par rapport à la longue tradition de résistance passive de cette région.

Elles n’en sont pas pour autant inarticulées ou chaotiques. Ces manifestations se sont clairement positionnées comme anti-privatisation et anti-nationalistes.

Ceci est extrêmement important en Bosnie, région où les autorités ont utilisé le nationalisme pour diviser la classe qui regroupe toutes les nationalités : la classe exploitée.

Ces manifestations peuvent être considérées comme une réponse aux politiques néolibérales dans la région qui conjuguent une précarisation des travailleurs à la privatisation des entreprises yougoslaves.

Le contenu de la proclamation des manifestants (traduite ici en fin d’article) n’est donc pas un hasard. L’origine des conflits a désormais changé : elle ne se situe plus sur la question nationale mais sur le plan économique. Ou, comme un graffiti bosniaque très diffusé sur l’Internet l’a dit : « qui sème la faim, recueille la colère. »

La Bosnie n’est pas le seul pays des Balkans dans cette situation. La Serbie et la Croatie ont récemment été secouées par des manifestations contre les lois nouvelles sur le travail. Désormais, dans ces pays, diverses manifestations de soutien à celles de Bosnie ont lieu.

Comme leurs collègues de Doboj en Bosnie, le syndicat de police de Serbie annonce qu’au cas où les manifestations franchiraient la frontière, ils désobéiraient au gouvernement.

Les pays de l’ex-Yougoslavie restent liés entre eux : en dépit de grandes différences, ils subissent une situation économique similaire – ils sont situés dans la périphérie de l’espace économique européen et, suite à l’effondrement du socialisme, sont malmenés par les forces du marché.

Comme nous l’avons dit, le domaine des conflits porte désormais sur l’économie.

Par conséquent, le conflit a commencé à mobiliser l’ensemble de cette périphérie indépendamment des nationalités. Des efforts énormes ont été réalisés pour organiser cette nouvelle structure politique qui est en train d’en finir avec le nationalisme.

Plénums et réunions sociales de citoyens se tiennent dans toutes les villes, mettant en évidence un nouveau mouvement politique qui n’est pas transfiguré par la représentation politique, mais basé sur la démocratie directe. Il s’agit d’une caractéristique bien identifiée par les deux protagonistes que sont les manifestants et les fonctionnaires.

Quelques ministres de Bosnie ont déjà démissionné. La déclaration du Haut Représentant de la communauté internationale en Bosnie, Valentin Inzko, « mardi on examinera l’intervention de troupes autrichiennes et l’EUFOR » témoigne de la profondeur de ces changements.

S’il ne s’agit plus d’un conflit ethnique mais économique, nous devons alors nous poser une question simple mais néanmoins très sérieuse : au nom de quoi lutterait cette armée ?

C’est cette même communauté qui n’a en rien aidé à résoudre les problèmes de la crise dite JMBG, lorsque les bébés bosniaques se sont vu refuser l’accès à des traitements médicaux parce que le gouvernement n’avait pas émis leurs numéros d’identification personnels.

Or, ce n’est pas par hasard si, dans son interview, Valentin a mentionné dans la même phrase que « les entreprises autrichiennes se portent bien en Bosnie » et que « la paix autrichienne » justifiait une intervention militaire.

Du coup, dans une approche typiquement néo-coloniale, il justifie le recours à la violence institutionnelle pour le maintien du libéralisme, européen et balkanique.

Les choses deviennent ainsi plus claires : il ne s’agit plus de conflits nationaux mais de quelque chose de plus profond – à savoir, la lutte de classes.


PROCLAMATION

le 7 Février 2014.

Aujourd’hui, un nouvel avenir se crée à Tuzla ! Le gouvernement local vient de présenter sa démission, ce qui répond à la première exigence des manifestants et crée les conditions permettant de résoudre les problèmes existants.

La colère et la rage accumulées sont le résultat d’un comportement agressif.

L’attitude des autorités a conduit à l’aggravation de celles-ci. Dans cette situation nouvelle, nous voulons concentrer cette rage et cette colère sur la construction d’un système de gouvernement utile et productif.

Nous invitons tous les citoyens à soutenir la mise en œuvre de ces exigences :

1. Maintien de l’ordre public et de la paix par la coopération des citoyens, de la police et de la protection civile, afin d’éviter toute criminalisation, politisation et manipulation des manifestations.

2. Mise en place d’un gouvernement technique, composé de membres experts, non partisans et non compromis. Ces membres ne devront pas avoir exercé dans le passé un mandat gouvernemental à quelque niveau que ce soit et dirigeront le canton de Tuzla jusqu’à l’élection de 2014. Ce gouvernement devra soumettre des plans et rapports hebdomadaires sur ses activités afin d’atteindre les objectifs fixés. Le travail du gouvernement devra être suivi par tous les citoyens intéressés.

3. Résolution par une procédure d’urgence de toutes les questions relatives à la privatisation des entreprises suivantes : Dita, Polihem, Poliolhem, Gumara et Konjuh. Le gouvernement devra :

 reconnaître les années d’ancienneté et garantir l’assurance-maladie des travailleurs ;

 poursuivre la criminalité économique et tous les acteurs qui y ont participé ; saisir les avoirs acquis illégalement ;

- annuler les privatisations de ces entreprises ; préparer une remise en cause des privatisations ;

- rendre les usines aux travailleurs et les placer sous le contrôle des autorités publiques afin de protéger l’intérêt public, et redémarrer la production de ces usines dès que cela est possible.

4. Homogénéisation des salaires des représentants du gouvernement avec les salaires des employés des secteurs public et privé.

5. Suppression des rémunérations additionnelles au revenu régulier des représentants du gouvernement au titre de leur participation à des commissions, comités et autres organes, ainsi que de toute autre rémunération déraisonnable et injustifiée se situant au-delà de ce que les employés ont droit.

6. Fin de tout salaire de ministres et éventuellement d’autres fonctionnaires du gouvernement à l’expiration ou à la résiliation du mandat.
Cette proclamation a été publiée par les travailleurs et les citoyens de Tuzla Canton, pour le bien de tous.

Une vidéo d’information du 7 février :


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