Panneaux solaires : pourquoi est-ce si difficile de les fabriquer en France ?

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Source : Reporterre

Panneaux solaires : pourquoi est-ce si difficile de les fabriquer en France ?

Par Elsa Souchay
3 mai 2024

Une grande partie des panneaux solaires installés en France sont fabriqués en Chine. - Pexels / Gustavo Fring

Faillites, délocalisations : les fabricants européens de panneaux photovoltaïques sont à la peine. La conséquence d’une farouche concurrence chinoise, mais aussi d’un manque de volonté politique.

D’un côté, le photovoltaïque s’étend et brille partout.

En Europe, mais aussi en France, où l’on rattrape progressivement le retard accumulé depuis des années.

De l’autre, l’entreprise Systovi, principal fabricant français de panneaux, a annoncé le 17 avril la cessation d’activité et le licenciement des 81 salariés de son usine de Carquefou (Loire-Atlantique).

Une fermeture qui intervient après l’annonce en janvier de la délocalisation de Meyer Burger, plus gros fabricant d’Allemagne, vers les États-Unis, tandis que la Norwegian Crystal avait déjà déposé le bilan en août 2023.

La Chine a 10 ans d’avance

Contradictoire ?

Pas vraiment.

Si le solaire explose partout, c’est notamment parce que les panneaux photovoltaïques (PV) restent une des solutions les moins chères et les plus rapides à mettre en œuvre pour effectuer la transition énergétique.

Un pays ne s’y est pas trompé : la Chine, qui selon une note de l’Académie des technologies a investi depuis 2011 plus de 50 milliards d’euros de financements publics, dix fois plus qu’en Europe sur la même période. Avec un tel soutien, se sont développés des géants industriels chinois qui se mènent entre eux une concurrence effrénée, tirant les prix toujours plus bas. Si la majeure partie des panneaux sont installés en Chine, les exportations de panneaux jusqu’à quatre fois moins chers que ceux produits en Europe saturent le marché.

En février, le lobby de fabricants European Solar Manufacturing Council s’inquiétait d’un stock de « 140 à 170 millions de modules PV dans les ports et entrepôts européens », soit 75 à 80 gigawatts (GW) de puissance électrique, l’équivalent d’un an et demi d’avance au rythme d’installation actuel dans l’Union européenne (UE).

La réaction tardive de l’UE

Alors que des mesures économiques protectionnistes avaient été prises en Inde dès 2018 et aux États-Unis en 2022, l’UE a mis plus de temps à réagir. Le 25 avril, le Parlement européen a voté son Net Zero Industry Act, censé booster la production des technologies nécessaires à la décarbonation de l’UE, excluant de fait des marchés publics futurs les panneaux chinois.

Des négociations sont également lancées pour interdire dans les chaînes d’approvisionnement le travail forcé, rapporté notamment dans la région chinoise du Xinjiang.

Mais ces mesures n’entreront au mieux en vigueur que d’ici deux ans.

« Plus de la moitié de la valeur ajoutée reste en France ou en Europe »

Au niveau français, le gouvernement avait lancé à l’été 2023 l’idée d’un pacte solaire dont le contenu a été précisé le 5 avril avec des objectifs de production par filière de fabrication, ainsi que la création d’ici cet été d’un « induscore », une étiquette de couleur valorisant les panneaux dont plusieurs étapes de production seront réalisées dans l’espace économique européen.

Et plutôt que de sauver les entreprises comme Systovi, « trop petite » selon le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, le gouvernement concentre son soutien à deux giga-usines : le projet Carbon à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) et Holosolis à Hambach (Moselle). Deux des futures plus grandes usines européennes, ambitionnant de produire jusqu’à 5 GW de panneaux par an, dès 2025.

Relocaliser la chaîne de production

Et contrairement à ce que font de nombreux fabricants actuels, il ne s’agira pas seulement d’assembler des composants importés, mais d’assumer sur site un plus grand nombre d’étapes de production.

Une large part des procédés de transformation du silicium en cellules photovoltaïques reste maîtrisée par des entreprises européennes.

L’Europe a d’ailleurs longtemps été le principal fournisseur de polysilicium et de machines-outils des industriels chinois.

Enfin, la filière photovoltaïque ne se limite pas aux seuls modules.

Le panneau ne représente que 10 à 15 % du coût du solaire et « plus de la moitié de la valeur ajoutée reste en France ou en Europe » dit Émilien Lassara, chargé de projet photovoltaïque chez Hespul, association engagée dans le solaire depuis trente ans. Car, ce qui coûte dans l’installation d’un panneau, c’est surtout la main d’œuvre, assumée aujourd’hui par le secteur du bâtiment.


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