L’industrie textile, un concentré des maux du Bangladesh

samedi 27 avril 2013
par  onvaulxmieuxqueca
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Source : Le Jura Libertaire

Bangladesh : La peau d’un ouvrier pour ton vêtement de marque

Posted on 25 avril 2013

Effondrement d’un immeuble au Bangladesh : le bilan dépasse les 200 morts

Les secours au Bangladesh luttaient toujours jeudi pour extraire des survivants piégés sous les décombres d’un immeuble, un effondrement qui a fait au moins 200 morts et relance la polémique sur la sécurité dans l’industrie textile fournissant des marques occidentales.

Cet immeuble de huit étages, Rana Plaza, abritait cinq ateliers de confection et il s’est effondré comme un château de cartes à 09H00 mercredi, à Savar, une ville à la périphérie de Dacca.

Il s’agit du pire accident dans l’histoire industrielle de ce pays défavorisé d’Asie du sud.

Des plaintes et des appels à l’aide de victimes englouties par des tonnes de gravats et d’acier tordu guidaient l’épuisant travail des secours au milieu d’un site évoquant les conséquences d’un puissant séisme. Des centaines de personnes attendaient, rongées par l’angoisse, en brandissant des photos de leurs proches.

Des ouvriers du textile travaillant au sein du bâtiment s’étaient publiquement inquiété la veille de fissures mais leurs responsables ont ignoré les mises en garde, leur enjoignant d’embaucher normalement le jour suivant.

Des dizaines de milliers d’ouvriers du textile ont manifesté dans une zone industrielle proche, provoquant la fermeture de centaines d’usines.

“Le bilan est désormais de 200 morts”, a dit à l’AFP A.B.M. Masud Hossain, précisant que des milliers de personnes, certaines brandissant des photos de proches, étaient massées sur les lieux du drame dans l’attente de nouvelles des personnes toujours portées disparues.

Le précédent bilan faisait état de 175 morts.

Quelque 1.000 personnes étaient par ailleurs soignées à l’hôpital, selon Hiralal Roy, un médecin urgentiste de l’hôpital Enam, proche du lieu du drame.

Les drapeaux étaient en berne jeudi, déclaré jour de deuil national en hommage aux victimes.

Les autorités disaient ignorer combien de personnes étaient encore prisonnières des décombres tandis que les pompiers entendaient encore des appels à l’aide provenant de différents endroits.

“Je viens juste d’entendre quelqu’un dire :

“S’il vous plaît, sauvez-moi”, a rapporté Mamun Mahmud, un responsable des pompiers, ajoutant qu’environ 1.500 personnes avaient été jusqu’à présent secourues.

Mahbubur Rahman, le chef des opérations de la brigade des pompiers, a précisé que les secours n’utilisaient plus d’équipement lourd pour déblayer le site afin d’éviter de mettre en danger les survivants.
Les corps des victimes reposaient dans une école proche et des milliers de personnes défilaient pour tenter d’identifier les disparus.

“J’ai vu tous les corps. Ma sœur n’est pas parmi eux. Elle n’est pas non plus à l’hôpital”, a confié Mukta Begum, en tenant une photo de sa sœur cadette, Suryaban, une ouvrière du textile.

Ce drame relance la polémique sur les conditions de sécurité et de travail dans le secteur textile au Bangladesh, le deuxième plus important au monde, qui fournit nombre de marques occidentales à bas prix.

En novembre 2012, un incendie dans une usine textile fournissant notamment la chaîne américaine Walmart avait fait 111 morts à la périphérie de Dacca. Selon des ouvriers, leurs responsables leur avaient demandé de rester à leur poste en affirmant qu’il ne s’agissait que d’un exercice d’alerte incendie.

Selon Tessel Pauli, une porte-parole de Clean Clothes Campaign, une association de défense des travailleurs du textile basée à Amsterdam, cet accident est “symptomatique” des problèmes dans ce secteur au Bangladesh.

“Ces accidents montrent un échec des marques (étrangères) à faire de la sécurité une priorité. Ils savent ce qui doit être fait et ne le font pas”, a-t-elle dénoncé mercredi auprès de l’AFP.

Selon l’Association des fabricants et exportateurs de textile au Bangladesh (BGMEA), les ateliers de confection situés dans l’immeuble employaient plus de 2.600 ouvriers.

La chaîne britannique de vêtements à bas prix, Primark, a indiqué que l’un de ses fournisseurs était basé au Rana Plaza.

“Le groupe est choqué et profondément attristé par cet accident épouvantable à Savar et exprime ses condoléances à toutes les personnes concernées”, selon un communiqué.

Le groupe Walmart a de son côté dit enquêter sur des accusations de militants pour les droits des ouvriers selon lesquelles il avait des fournisseurs basés au Rana Plaza. L’espagnol Mango a admis des liens avec un fabricant de l’immeuble.

L’italien Benetton a en revanche démenti tout lien mais des documents fournis par des organisations de défense des ouvriers montrent des commandes placées par la marque en septembre dernier.

Un responsable de la police, Monir Hossain, a précisé qu’une enquête avait été ouverte à l’encontre du propriétaire du bâtiment, un membre du parti au pouvoir, pour violation des règles de construction.

Mustafizur Rahman, le responsable d’une unité de police chargée du secteur industriel, a par ailleurs affirmé que les propriétaires des ateliers situés dans l’immeuble avaient délibérément ignoré un appel de fermeture lancé par les autorités et demeuraient invisibles depuis la catastrophe.

“Après avoir constaté les fissures mardi, nous leur avons dit de fermer les ateliers. Ils n’en ont pas tenu compte”, a-t-il conclu.
Presse esclavagiste (Agence Faut Payer, 24-25 avril 2013)


Source : Slate.fr

Publié le 26/04/2013

L’industrie textile, un concentré des maux du Bangladesh

Ils sont multiples et engagent la plupart des acteurs : les compagnies occidentales qui se satisfont trop souvent de rapports de sécurité ineptes, les autorités corrompues, le manque de volonté politique et collusion entre les politiciens, les forces de sécurité et le grand patronat.

Près de 400 morts en six mois et dans tous les cas par négligence. Le dernier exemple en date, l’immeuble de neuf étages qui s’est effondré près de Dhaka, la capitale du Bangladesh, ensevelissant près de 250 ouvriers et ouvrières de cinq usines textiles avait été construit sans supervision et sans réelle autorisation.

En pleine expansion depuis une vingtaine d’années, l’industrie du vêtement au Bangladesh qui représente avec quelques 20 milliards de dollars près de 80% des exportations du pays sert beaucoup d’intérêts. D’abord elle emploie environ 3,5 millions d’ouvriers —à 90% des femmes— qui pour la plupart n’ont en commençant, aucune formation.

Même si les salaires restent très bas, 28 euros au minimum et entre 40 et 80 euros en moyenne, ils constituent un apport non négligeable dans un pays qui demeure l’un des plus pauvres du monde.

Ces salaires très inférieurs à ceux de la Chine ou de l’Inde par exemple ont permis au Bangladesh de devenir le deuxième exportateur mondial de vêtements. La plupart des grandes compagnies occidentales mais aussi les acheteurs dans ces pays profitent bien évidemment de la situation.

Depuis quelques années, l’accent mis sur le développement responsable ont conduit nombre de ces compagnies à se montrer plus regardante sur les conditions de travail dans les pays où ils se fournissent. Le Bangladesh a pris des mesures dans ce sens et des efforts ont été faits. Mais le pays n’échappe pas aux maux traditionnels de la région : corruption généralisée, police politisée, absence de réelle considération pour une main d’œuvre corvéable à merci.

La chaîne de fabrication est souvent plus diversifiée que ne le croit l’acheteur qui de son côté ne cherche pas trop à savoir. Le Bangladesh a plus de 5.000 usines de confection et à côté d’usines modernes aux normes internationales, combien sont des ateliers installés dans des immeubles insalubres, sans protection contre l’incendie, sans voie d’accès pour les secours etc.

Ces ateliers ne commercent pas directement avec les grandes chaines occidentales. Ils ne sont que des sous-traitants de sous-traitants, chacun prenant sa dime au passage.

Pour satisfaire les clients dans les délais les plus rapides, des compagnies établies sous-traitent le travail sans là aussi trop regarder comment se déroule les choses.

De leurs côtés, les autorités ne veulent pas tuer la poule aux œufs d’or que représente cette industrie. Ces deux dernières années, toutes les manifestations des ouvriers du textile réclamant une hausse des salaires et de meilleures conditions de travail ont été durement réprimées. Dans les zones franches où sont installées de nombreuses usines de confection, les syndicats sont interdits.

A cela s’ajoute la corruption ambiante qui fait que beaucoup d’usines qui ne respectent aucune des normes établies continuent de fonctionner. L’immeuble qui vient de s’effondrer appartenait à une jeune étoile montante du parti au pouvoir. Quel agent municipal ou policier oserait s’opposer à un politicien qui a tous les moyens de lui faire perdre son emploi ?

Les remèdes aux maux de l’industrie de la confection bangladeshie sont multiples et engagent la plupart des acteurs. Les compagnies occidentales se satisfont trop souvent de rapports qu’elles ne contrôlent pas et d’enquêtes hâtives et succinctes dans des usines habilement choisies.

La sous-traitance pratiquée par de grands patrons bangladeshis devrait être sévèrement encadrée pour éviter tous les abus.

Enfin le gouvernement bangladeshi porte la responsabilité de faire appliquer les règles qu’il édicte et qui sont bafouées par manque de volonté politique et collusion entre les politiciens, les forces de sécurité et le grand patronat.

La multiplication des accidents pourrait toutefois menacer à terme cette industrie très porteuse pour le pays.
Françoise Chipaux
 


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