« 90 kg de pain sans subir la hausse des coûts de l’énergie » : pourquoi le modèle du four solaire se diffuse Transition énergétique

mercredi 20 septembre 2023
par  onvaulxmieuxqueca
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Source : Basta

« 90 kg de pain sans subir la hausse des coûts de l’énergie » : pourquoi le modèle du four solaire se diffuse Transition énergétique

20 septembre 2023 par Marylène Carre

Il y a quatre ans, le boulanger normand Arnaud Crétot lançait sa première cuisson de pain au four solaire. Aujourd’hui, l’expérience de sa coopérative NeoLoco a fait des petits et lui continue de diffuser son modèle énergétique alternatif.

Quand le soleil pointe son nez au-dessus de Montville (Seine-Maritime), le boulanger Arnaud Crétot est toujours prêt à lancer sa cuisson.

Il faut une heure à LyteFire, le four solaire conçu par l’entreprise finlandaise Solar Fire, pour atteindre 250 degrés. Arnaud enfourne 38 kilos de pains qui sortiront dorés à point une heure plus tard. Avec son four solaire, le boulanger fait aussi l’économie de 7,5 kW/h d’électricité, fournie gratuitement par le soleil.

À l’heure de l’explosion des coûts de l’énergie, l’économie est bienvenue. Le principe du four est de concentrer les rayons du soleil, captés par un mur de 69 miroirs, en un même point : le four. « Comme si on cuisait un cookie avec une loupe orientée vers le soleil, mais en beaucoup plus puissant », schématise le boulanger ingénieur.

Arnaud Crétot a découvert Solar Fire en Inde alors que, jeune ingénieur sorti de PolyTech Nantes, il réalisait un tour du monde des solutions énergétiques. Il est ensuite devenu directeur technique de l’entreprise qui développe des concentrateurs solaires pour des boulangeries artisanales et des torréfacteurs en Afrique. L’homme a aussi décidé de reproduire l’expérience en Normandie. Il y a lancé en 2019 sa coopérative NeoLoco (« nouveau fou » en espagnol) , la première boulangerie solaire d’Europe.

150 artisans formés depuis 2021


Pour produire suffisamment de pain et rendre l’activité viable, Arnaud Crétot a doublé la surface de son four il y a trois ans, passant de 5 m2 à 11 m2 de miroirs.

Aujourd’hui, la coopérative emploie quatre personnes. Le four est mis en route tous les jours de soleil de la semaine pour cuire le pain ou des graines. Et il est visité par des scolaires, des associations, des entreprises et des porteurs de projet en formation. Près de 150 artisans y ont été formés depuis 2021.

L’alternative de NeoLoco consiste à s’adapter à l’énergie intermittente qu’est le soleil. Puisque celui-ci ne brille en moyenne que 40 % du temps en Normandie, il faut utiliser ces moments en priorité pour la cuisson.

« Il suffit de transformer le modèle économique en pensant l’organisation du travail en fonction d’une énergie qui ne peut pas être utilisée en continu détaille le boulanger ingénieur. Pour les produits périssables, comme le pain, il faut remettre à plat les savoir-faire et maximiser la production à chaque étape : utiliser une farine au levain, qui permet une plus longue conservation du pain, varier les temps de levée et de cuisson en fonction de l’ensoleillement disponible, précommander les pains à l’avance pour ne cuire que ce dont on aura besoin et livrer le jour prévu… »

Et si vraiment le soleil ne se lève pas, on cuit au feu de bois ! « Avec ce système, on arrive à produire 90 kg de pain en une journée sans avoir à subir la hausse des coûts de l’énergie et donc à augmenter nos coûts auprès de nos clients », indique le boulanger.


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S’adapter à l’énergie intermittente

Pour le fondateur de NeoLoco, « le problème de la fourniture d’énergie est moins technique que sociétal. J’ai pu le constater lors de mon tour du monde : les stratégies énergétiques des pays répondent à des habitudes culturelles et historiques, qui n’ont rien à voir avec la science. En France, on apprend toujours dans les écoles d’ingénieur à trouver la meilleure solution technique qui permettra de fournir de l’énergie en continu. » Au lieu d’essayer de s’adapter à des sources d’énergies intermittentes.

La coopérative d’Arnaud Crétot est visitée par des scolaires, des associations, des entreprises et des porteurs de projet en formation.
©NeoLoco

Pour alimenter un four aussi puissant que Light Fire, il faudrait 70 m2 de panneaux photovoltaïques et une batterie de stockage, rappelle régulièrement Arnaud lorsqu’il intervient en école d’ingénieurs !

Le modèle que le boulanger diffuse dans ses formations et dans un livre récemment publié aux éditions Terre vivante, La boulangerie solaire, un exemple pour un avenir radieux, est celui de l’utilisation d’une énergie intermittente dans un processus de production.

Douze artisans solaires en France

Preuve que le modèle est viable : il est repris par d’autres professionnels. Depuis l’expérimentation initiée par NeoLoco, douze artisans se sont lancés en France dans la torréfaction solaire, à Lyon, Montaigu, Rennes, Dieppe, Grenoble…

À Montaigu, entre Nantes et La Roche-sur-Yon, Michel Mouillé a par exemple acquis un four solaire en juin 2022. Il y torréfie des graines locales et bio pour l’apéritif ou comme substitut au café. « Je viens d’essayer avec des mogettes de Vendée et des féverolles », dit-il. Cet animateur en éducation à l’environnement, bricoleur et touche-à-tout, avait déjà fabriqué des prototypes low-cost de four solaire pour un usage familial. Il s’est lancé dans une utilisation artisanale après avoir découvert Neoloco.

« Je suis venu me former à plusieurs reprises, puis j’ai ramené d’autres personnes. Arnaud est devenu un ami », précise l’homme.

Sa SARL produit 80 kilos de graines torréfiées par mois et propose des stages de fabrication de fours et déshydrateurs solaires. Dans la même logique que NeoLoco, l’entreprise de Michel Mouillé se veut aussi un laboratoire en phase avec le réel. L’artisan teste par exemple actuellement la fonte de plastique recyclé, en lien avec l’Atelier des Recycleurs fous de La Verrie, en Vendée. Il imagine ravitailler bientôt les festivals du Grand Ouest de frites cuites au four solaire !

Un modèle aussi pour le textile et la construction

D’autres secteurs pourraient se libérer des coûts en hausse de l’énergie en suivant la méthodologie développée par le boulanger solaire, qui se décline en quatre points. Primo, il faut lister toutes les étapes de la production, de la fabrication à la vente. Ensuite, il s’agit d’identifier celles qui consomment de l’énergie. Puis prioriser les tâches énergivores quand l’énergie solaire est disponible. Et enfin, gérer son entreprise par le stock plutôt qu’en flux tendu.

« Pour les produits de conservation, comme les graines torréfiées, c’est simple. On les cuit quand le soleil est là et on réalise toutes les autres étapes de production, soit 90 % du processus, le reste du temps », explique Arnaud Crétot.

Ce qui est vrai pour les graines l’est pour beaucoup d’autres produits industriels, comme l’industrie textile ou la construction. NeoLoco expérimente actuellement la production de bardage en bois brûlé en lien avec une menuiserie locale, Noblessence. Le bois ainsi traité résiste mieux aux insectes et moisissures, réduisant l’utilisation de traitements ultérieurs.

Marylène Carre
Photo de une : Arnaud Crétot devant les 11 m2 de miroirs de son four à pain solaire/©Charlotte Krebs


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https://www.youtube.com/watch?v=pudINL8cWsg


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